L'aménagement durable, d'hier à aujourd'hui

L'aménagement durable vise à aménager des environnements bâtis résilients, sobres en ressources, adaptés à leurs habitants et usagers et économiquement viables.

Il intègre les besoins de tous les usagers, optimise l'utilisation des ressources locales, favorise la biodiversité et réduit l'empreinte écologique.

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Thibaut Vergoz

Qu’est-ce que l’aménagement durable ? 

L’aménagement durable consiste à concevoir, à bâtir et à aménager des territoires de manière à favoriser des environnements résilients, économes en ressources, inclusifs et créateurs de valeur pour leurs habitants. 

Aujourd’hui, l’aménagement durable s’inscrit en France dans un contexte de crises écologiques, économiques et sociales qui imposent de repenser en profondeur nos façons de vivre ensemble, mais également d’habiter, de produire et d’organiser les territoires. 

Un territoire est durable lorsqu’il parvient à articuler l’organisation de ses espaces avec les attentes de ses habitants, en les intégrant dans la prise de décision. Les besoins quotidiens doivent pouvoir se satisfaire à proximité : proximité des services essentiels (éducation, santé, emploi), des commerces, accessibilité numérique, ou encore proximité d’espaces naturels. 

De fait, un territoire durable est un territoire qui offre à chacun un cadre de vie sain, sûr et solidaire, où la qualité de l’air, le logement, les services publics et le vivre ensemble sont au cœur des priorités locales. 

Cette approche mobilise l’ensemble des acteurs publics et privés de l’aménagement autour de la recherche de solutions innovantes pour répondre aux défis contemporains et préparer durablement l’avenir.

De l’Etat aménageur à la décentralisation : l’histoire de l’aménagement en France

Historiquement, l’aménagement du territoire était une prérogative de l’État central, souvent qualifié d’"État aménageur". Cette configuration s’inscrivait dans la tradition française d’une forte centralisation administrative, héritée de l’histoire du pays. Tout au long du XXe siècle, l’État s’est affirmé comme l’acteur principal de la planification et de l’organisation du territoire national, veillant à la mise en œuvre de politiques structurantes à l’échelle de l’ensemble du pays. 

L’exode rural, la nécessité de moderniser l’économie et la reconstruction des territoires après les deux guerres mondiales ont conduit à une mobilisation sans précédent des pouvoirs publics. L’État a alors créé des institutions spécifiques telles que le Commissariat Général au Plan, chargé de la planification économique et sociale, ou la Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale (DATAR), créée en 1963, pour piloter et coordonner les grands projets territoriaux. Cette période se caractérise par la réalisation d’infrastructures majeures, comme les réseaux ferroviaires à grande vitesse, ainsi que par le développement de projets urbains ambitieux, à l’exemple des villes nouvelles.

À partir des années 1980, la France connaît un tournant majeur avec l’engagement du processus de décentralisation. Initiée par les lois Defferre de 1982-1983, cette réforme profonde conduit à un transfert progressif de compétences de l’État vers les collectivités territoriales, à savoir les régions, les communes et les intercommunalités.  Autrefois monopole de l’État, l’aménagement du territoire est désormais une compétence partagée entre différents niveaux de gouvernance. 

Cette transformation institutionnelle marque le passage d’un aménagement centralisé et planificateur à l’échelle nationale, guidé par une vision descendante, à une gouvernance plus territorialisée : chaque échelon peut désormais adapter les politiques d’aménagement aux spécificités et besoins locaux, tout en s’inscrivant dans le cadre plus large des orientations étatiques.

Le tournant historique et sociétal

La fin du XXe siècle a marqué un tournant : la prise de conscience de l’impact de l’activité humaine sur l’environnement impose de repenser la vision classique de l’aménagement des villes et des territoires. Désormais, l’aménagement intègre une dimension durable en cherchant à conjuguer l’organisation de l’espace adaptée à ses habitants, la préservation des ressources, et l’attractivité des territoires. 

La prise en compte de l’environnement dans les pratiques de l’aménagement

La prise de conscience des problématiques environnementales est d’abord impulsée par la communauté internationale à partir des années 1990 avec la Conférence de Rio (1992), l’Agenda 21, les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et enfin les Objectifs de Développement Durable (ODD) de l’ONU. Ces grandes tendances au niveau international sont ensuite relayées à l’échelle européenne et enfin à l’échelle nationale. 

Cette inflexion se traduit en France par des lois et des réformes d’envergure, intégrant les problématiques environnementales dans les documents d’aménagement.  De fait, le développement durable devient le fil conducteur des politiques territoriales, cherchant à concilier de grands défis : 

  • sobriété dans la consommation des ressources et de l’énergie ;
  • résilience notamment face au changement climatique ;
  • cohésion sociale ;
  • création de valeur sur les territoires, tant culturelle qu’économique.

Les lois qui ont marqué le tournant de l'aménagement

Parmi les lois phares qui ont marqué une rupture avec la vision classique de l’aménagement urbain et territorial, on peut citer : 

  • La Loi Solidarité et Renouvellement Urbains (SRU) de 2000, qui vise à densifier de manière raisonnée les espaces déjà urbanisés afin d’éviter l’étalement urbain et cherche à réduire la place de l’automobile au profit des transports en commun.
  • Les Lois Grenelle I et II (2009-2010) qui renforcent la prise en compte de l’environnement dans l’aménagement du territoire et dans le domaine de l’urbanisme en plaçant au cœur des outils de planification urbaine la lutte contre le réchauffement climatique, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la préservation de la biodiversité, les mobilités durables et la lutte contre l’étalement urbain.
  • La Loi pour l’Accès au Logement et un Urbanisme Rénové (loi ALUR) de 2014 qui entend favoriser une gestion plus économe du foncier, renforcer la densification des zones urbaines, tout en améliorant l’accès au logement et sa qualité par la lutte contre l’habitat indigne et la dégradation des copropriétés.
  • La Loi Climat et Résilience de 2021 qui cherche à lutter contre l’artificialisation des sols pour protéger les écosystèmes. La loi fixe un objectif de sobriété foncière et de limitation de l’artificialisation, en atteignant le « zéro artificialisation » nette d’ici 2050. 

Pour répondre à ces défis complexes, de nouveaux outils et démarches ont été intégrés dans la boîte à outils des collectivités. Les ÉcoQuartiers, par exemple, témoignent d’une volonté de créer des espaces urbains exemplaires en matière de performance énergétique, de mobilités douces et de mixité sociale. 

Ce qu'il faut retenir

L’aménagement du territoire se construit aujourd’hui dans une perspective de durabilité grâce à une coordination étroite entre tous les niveaux de gouvernance. État, régions, intercommunalités et communes s’articulent pour bâtir des territoires plus résilients, chacun exerçant des compétences spécifiques tout en veillant à leur cohérence avec l’intervention des autres. C’est cette articulation entre les différents échelons et les dispositifs qu’ils portent qui permet de relever, collectivement, les défis complexes de l’aménagement durable.

Les différentes échelles de l'aménagement durable

Les projets d'aménagement durable peuvent être mis en œuvre à différents niveaux, allant du local au global. Chaque échelle a ses propres enjeux, outils, opportunités et approches spécifiques. 

Les échelles

A cette échelle, les projets d'aménagement durable répondent aux besoins locaux tout en intégrant des enjeux de sobriété foncière et d’adaptation au changement climatique. C’est à cette échelle que les habitants sont le plus mobilisés, notamment grâce à des ateliers participatifs et des consultations régulières qui permettent de recueillir leurs idées et préoccupations. Les initiatives combinent le plus souvent constructions durables, énergies renouvelables et mobilités douces. 
 

Cette échelle permet de coordonner des projets d'aménagement à un niveau large, en associant différentes communes sur des projets d’aménagement communs. C’est aussi l’échelle privilégiée pour la planification en matière d’urbanisme qui prend en compte l’ensemble des enjeux d’un territoire à cette échelle, notamment au travers des orientations d’aménagement et de programmation (OAP). Les initiatives incluent la recomposition territoriale pour réduire l’exposition aux risques climatiques, ou bien des partenariats pour des projets d’aménagement d’envergure.  

Cette échelle fixe les grandes orientations en matière d’aménagement des territoires et l’égalité des territoires à travers des schémas de planification. Les différents documents de planification fixent les objectifs en matière d'équilibre et d'égalité des territoires, d'implantation des différentes infrastructures d'intérêt régional, de désenclavement des territoires ruraux, d'habitat, de gestion économe de l'espace, de lutte contre l'artificialisation des sols, d'intermodalité et de développement des transports de personnes et de marchandises, de développement logistique et industriel, notamment en matière de localisation préférentielle, de maîtrise et de valorisation de l'énergie, de lutte contre le changement climatique, de développement de l'exploitation des énergies renouvelables et de récupération, de pollution de l'air, de protection et de restauration de la biodiversité, de prévention et de gestion des déchets (art L4251-1 CGCT). 

Les politiques nationales fixent les orientations d'aménagement durable à travers des lois et des réglementations qui s'appliquent à l'ensemble du territoire national. L'État joue un rôle clé en finançant ou en participant au financement de grandes opérations d’aménagement, aux côtés des collectivités territoriales partenaires dans la mise en œuvre de projets d’aménagement durable. 

Les organisations internationales et la coopération entre États influencent aussi les politiques d’aménagement durable. Cela concerne notamment les accords et conventions internationales pour la protection de l'environnement et la promotion du développement durable ou encore la coopération étroite entre pays dans le partage de ressources technologiques ou financières pour le développement de projets d’aménagement durable. L’Union européenne occupe une matière de premier plan en matière d’aménagement durable, notamment à travers l’élaboration de directives et de règlements. Elle fixe également des stratégies et des plans d’actions qui orientent les politiques publiques nationales et locales en termes d’aménagement durable.  

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